Quand Aliénor d’Aquitaine meurt à Poitiers en 1204 à l’âge de 82 ans, elle est emmenée à l’abbaye royale de Fontevraud pour y être enterrée auprès de son second mari, Henri II d’Angleterre, et de son fils préféré Richard Cœur de lion. C’est ici qu’elle a passé ses dernières années. Et pourtant, Fontevraud n’est pas demeurée seulement le lieu de repos d’Aliénor d’Aquitaine. Comme son illustre hôte, Fontevraud a eu plusieurs vies, d’abord cité monastique, nécropole royale, puis pénitencier et aujourd’hui centre culturel.
J’ai une affection particulière pour Aliénor d’Aquitaine, pour plusieurs raisons, mais peut-être d’abord pour la raison la moins objective de toutes, Aliénor était comtesse du Poitou et sûrement la figure historique la plus importante que ma ville Poitiers ait connue. Elle fut reine de France (épouse de Louis VII) mais aussi reine d’Angleterre (épouse d’Henri II Plantagenêt). Elle fut surtout une femme de caractère et de pouvoir.
En ce premier jour ensoleillé de mars, j’ai donc décidé de rendre visite à Aliénor…du moins à son gisant. Ce n’était pas ma première visite, j’étais déjà venue 5 ans auparavant, par un week-end pluvieux et très fréquenté. Cette fois-ci, j’avais le site presque pour moi toute seule. Passé la réception, on entre tout de suite dans le vif du sujet en pénétrant dans l’église abbatiale. Il y a toujours une sorte de solennité à entrer dans un lieu de culte, mais ici la solennité est exacerbée par les dimensions de l’église, par la blancheur de ses pierres, par le vide de sa nef, et par la présence un peu intimidante de ses quatre gisants près de l’autel.

Aliénor et son mari Henri II Plantagenêt

Richard Coeur de Lion et Isabelle d’Angoulême (femme de son frère Jean Sans Terre)
A la sortie du sanctuaire, on se dirige vers le cloître du Grand-Moûtier baigné de lumière et la salle capitulaire où se réunissait la communauté monastique de l’abbaye.
Mais ce qu’il y a d’intéressant dans ce complexe religieux, c’est qu’il n’est plus religieux justement mais culturel. Les artistes contemporains ont ici une place de choix et un écrin royal pour leurs œuvres. Il y a cinq ans, je me souviens que le cloître avait été investi par une immense installation de bois. Cette fois-ci, le cloître a retrouvé sa quiétude mais le grand dortoir abrite une expérience insolite de Claude Lévêque, Mort en été. La salle est envahie par une lumière rouge diffusée par des néons suspendus en forme de vague. Au sol gisent des barques dans lesquelles les visiteurs sont invités à s’allonger. Au son de petites clochettes, c’est un appel à la méditation. Pour ma part, j’ai eu du mal à me relaxer car j’avais l’impression d’être un peu comme les quatre gisants de l’église allongée dans ma boîte. Mais je me suis concentrée sur le plafond en poutres tel une coque de bateau renversée, dans ma barque, avec les vagues de lumière. L’expérience est étonnante.
L’art a même envahi les caves de Fontevraud avec Julien Salaud et la Crypte des effraies. Les couloirs voûtés des caves sont animés par des scènes parfois effrayantes. Et je dois dire que je n’y ai pas fait long feu…seule avec l’écho de mes propres pas dans l’obscurité, il n’en fallait pas plus pour avoir peur de mon ombre.
La seule partie qui m’a moins intéressée fut les salles sur le passé carcéral de l’abbaye. En effet elle fut transformée en prison de 1804-1985. C’est une partie importante de l’histoire du lieu mais mon esprit était trop absorbé par la période médiévale et par Aliénor, la principale raison de ma venue. Ma seule déception fut de ne pas voir les cuisines romanes à l’architecture étonnante, fermées alors pour restauration (jusqu’en 2020).
CARNET PRATIQUE
- site officiel: Fontevraud
- tarif entrée: 11€ de 9h30 à 18h
- 1h de route d’Angers, 1h de route de Tours (on peut s’inscrire pour du co-voiturage directement via le site de Fontevraud)
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Des visiteurs de l’abbaye m’ont rapporté récemment que l’autel du chœur n’était plus le même , ils ont été très déçus par ce changement Va-t-on désacraliser ce lieu ? Je voudrais savoir si ce changement est provisoire Je suis née dans le même village que Robert à Arbrissel et tout ce qui touche son histoire me touche également Merci pour votre réponse
j’ai remarqué que l’autel cette fois-ci n’était pas le même que la dernière fois que j’y suis allée, mais j’ignore la raison
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