Les trésors archéologiques des Orcades

Si mon amie M et moi avons choisi de passer une semaine dans l’archipel des Orcades plutôt que sur n’importe quelle autre île écossaise, c’était en partie pour ses vieilles pierres. Cela paraît improbable mais ces petites îles perdues au large du nord de l’Ecosse sont un centre archéologique très important en Europe. L’archipel concentre un si grand nombre d’édifices néolithiques sur son petit territoire qu’il est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1999 sous le titre de Heart of Neolithic Orkney (le cœur néolithique des Orcades). La plupart des vestiges néolithiques se trouvent sur l’île principale de Mainland mais en réalité on en croise un peu partout dans l’archipel, comme par exemple le site de Knap of Howar sur l’île de Papa Westray (la plus vieille maison d’Europe), la tombe de Dwarfie stane sur l’île de Hoy, le cairn funéraire de Taversöe Tuick sur l’île de Rousay ou encore le site de Cata Sand sur l’île de Sanday. Les Orcadiens ont l’habitude de dire qu’il y a des pierres levées dans chaque jardin de l’archipel. C’est peut-être exagéré, mais il faut bien avouer qu’on en trouve vraiment beaucoup un peu partout si on fait attention.

Le cœur néolithique des Orcades

Le cœur néolithique des Orcades comme défini par l’UNESCO comprend quatre sites: le foyer de peuplement de Skara Brae (en haut à gauche), les cercles de pierres de Stenness en haut à droite) et de Brodgar (en bas à gauche), ainsi que la tombe de Maeshowe (ou Maes Howe en bas à droite). Ce sont les sites les plus impressionnants de l’archipel et ils comptent parmi les sites les plus importants d’Europe datant de cette période. Ils sont tous facilement accessibles en bus ou en voiture. Les entrées des cercles de pierres sont gratuits mais les deux autres sites sont payants. L’inscription au patrimoine de l’UNESCO précède la découverte du Ness. Les archéologues supposent qu’il y a encore beaucoup de sites à explorer dans ce coin, et cherchent toujours à expliquer pourquoi l’archipel est si riche en vestiges et quelles sont les connexions entre les différents sites. On pense aussi que les Orcades pouvaient être un lieu de pèlerinage à l’époque néolithique et que les visiteurs pouvaient faire plusieurs centaines de kilomètres pour s’y rendre.

Skara Brae

C’est le site le plus réputé des Orcades et celui qui draine le plus de touristes (souvent des touristes débarqués pour la journée des bateaux de croisière). C’est tout simplement le village néolithique le mieux préservé d’Europe et il est tout à fait étonnant. Ses habitants auraient vécu ici il y a 5000 ans, la mer était alors plus éloignée des abords du site. Les habitants n’étaient donc pas des pêcheurs mais des fermiers (même s’ils pêchaient et chassaient aussi). Le village est demeuré enfoui sous les dunes pendant des milliers d’années et c’est une tempête en 1850 qui dévoila l’existence du village en érodant le haut des dunes. Il est composé de huit bâtiments semi-enterrés avec des toits de terre (sept maisons et un atelier) reliés par des petites ruelles couvertes. Les habitants vivaient donc dans une communauté de 50 à 100 personnes. Ce qui frappe c’est de se rendre compte qu’il y a 5000 ans, les hommes et femmes du Néolithique avaient déjà posé les bases de nos habitations actuelles avec du mobilier (des lits, couvertures, cuisine, espaces de rangement, étagères, même de petites toilettes séparées) et un foyer au centre.

La visite commence par le hall d’exposition à l’entrée du site dans lequel on peut en apprendre plus sur la vie à cette époque et voir des bijoux, outils, poteries et autres objets mystérieux (comme cette balle à picots) retrouvés sur les lieux. Il y a aussi une boutique et un café.

On sort ensuite pour trouver une reproduction couverte d’une des maisons. On peut visiter cette reproduction ce qui permet de se rendre compte de l’espace et de l’organisation de la vie dans la maison. Le village se trouve un peu plus loin au bord de l’eau après une petite marche. A noter que sur le site de Skara Brae on peut aussi visiter Skaill House, la grande maison du XVIIe siècle du riche propriétaire qui découvrit les vestiges néolithiques.

Ring of Brodgar

Quand on parle de cercle de pierres, on pense forcément au célèbre Stonehenge mais sachez que le cercle de Brodgar le précède de 400 ans et aurait donc été érigé il y a environ 4500 ans. Le cercle de Brodgar est également bien plus grand puisqu’il fait plus de 100m de diamètre, il est entouré d’un fossé rempli de bruyères et comprenait à l’origine 60 pierres levées. Il en reste aujourd’hui 36, mais seulement 27 sont encore debout. Elles n’ont pas toutes la même taille (de 2m à 4,5m) ni la même forme. L’accès au site est gratuit et je ne vous cache pas qu’il y avait un côté magique d’approcher ces pierres au moment du coucher du soleil, la lumière incroyable qui caressait les pierres, la bruyère flamboyante et les herbes dorées qui dansaient au milieu des pierres, cette ambiance calme et mystique à la fois, l’impression d’être dans un endroit spécial, chargé d’une force spirituelle indéniable. Faire le tour de ces pierres ne laisse pas indifférent. Au moment où nous y sommes allées, l’accès à l’intérieur du cercle était interdit pour préserver le sol des pas des touristes (140 000 visiteurs par an), mais il est parfois possible de marcher à l’intérieur. On peut néanmoins y aller à n’importe quelle heure du jour et de la nuit.

Comet stone

Ce monolithe mesure 1,75m de haut et a l’air d’être tout seul mais il ne l’était peut-être pas. Situé sur le chemin qui mène au cercle de Brodgar, des archéologues pensent qu’il est le seul élément encore visible d’un dolmen en forme de table.

Ness of Brodgar

C’est ici que vibre le cœur des fouilles dans les Orcades. Situé sur la mince langue de terre entre le loch de Stenness (eau de mer) et le loch de Harray (eau douce), ce n’est qu’en 2003 qu’est découvert ce site dans le jardin d’une maison. Le site n’est fouillé que huit semaines par an en été mais des bénévoles y viennent du monde entier. Le reste de l’année le site est recouvert de bâches et pneus, et nous avons malheureusement manqué ça à quelques jours près (mais nous avons bu les paroles des bénévoles et professeurs que nous avons rencontrés pendant notre séjour et qui nous ont raconté les fouilles avec passion). Il s’agit d’un grand complexe néolithique de 5000 ans environ qui comporte douze grands bâtiments entourés par une enceinte épaisse. D’importantes découvertes ont lieu tous les ans et les experts pensent désormais qu’il s’agit du plus grand site rituel du Néolithique en Europe. Le site n’est pas destiné à être ouvert au public dans le futur (lors de la période de fouilles, on peut l’observer sur un échafaudage) car les fouilles seront limitées dans le temps. Elles étaient largement financées par l’Union européenne et le Brexit va compliquer les années à venir. Dans quelques années, le site sera de nouveau enfoui, recouvert de terre pour le cacher et ainsi le préserver.

Watch stone

Ce mégalithe sentinelle de 5,6m de haut est situé au point où les lochs de Harray et Stenness se frôlent, séparés par cette petite route qui mène au Ness et au cercle de Brodgar. La watch stone marquerait l’entrée proche du Ness mais ce n’est pas sûr. Dans les années 1930 on a retrouvé la trace d’une pierre similaire juste à côté. Certains archéologues pensent que ces deux pierres appartiennent à un autre cercle de pierres disparu sous les eaux du loch de Stenness. En effet, à l’époque néolithique, le niveau de l’eau était bien plus bas.

Barnhouse settlement

Au bord du loch of Harray se trouve le village de Barnhouse. Il n’a été découvert qu’en 1984 et consiste en une douzaine de maisons et une plus grande structure. Le village daterait d’il y a 5000 ans, environ la même époque que les pierres de Stenness, ce qui fait penser que les deux sites étaient liés. La structure ronde des maisons ressemble à celle du village de Skara Brae même s’il ne reste plus grand chose.

Standing stones of Stenness

200 mètres plus loin se trouvent les pierres dressées de Stenness (environ 1,5 km du cercle de Brodgar). Le cercle est beaucoup plus petit que Brodgar mais aussi plus ancien. Ce serait le plus ancien cercle de pierres du Royaume-uni puisqu’il aurait été érigé autour de 3100 avant J.-C. Le cercle était constitué d’une douzaine de pierres. Celles qui sont encore debout ont une taille impressionnante, elles sont bien plus grandes que celles du cercle de Brodgar et peuvent atteindre 5 m de haut. Le cercle était également entouré d’un fossé et la seule entrée se trouvait en direction du village de Barnhouse. A l’entrée il y avait un dolmen, et au centre un foyer. Les archéologues ont même calculé qu’il a sûrement fallu 50 000 heures de travail pour ériger ce cercle. Au XIXe siècle, le fermier propriétaire des lieux a décidé qu’il en avait marre de voir ces vieilles pierres dans son champ alors il a commencé à les dynamiter! Il a eu le temps d’en détruire deux avant d’être arrêté.

Barnhouse Stone

Plusieurs dizaines de mètres devant l’entrée de la tombe de Maeshowe se dresse une pierre seule, la pierre de Barnhouse. Elle signifiait sûrement l’entrée du site. Au moment du solstice d’hiver, les rayons du soleil sont en alignement parfait avec la pierre et l’entrée du tunnel.

Maeshowe

Cette motte de terre au milieu d’un champ avec les moutons qui broutent tranquillement dessus n’a peut-être l’air de rien mais il s’agit en fait d’un tumulus funéraire. C’est même la tombe néolithique la plus élaborée retrouvée en Europe. Elle date de 2700 ans avant notre ère, donc de la même époque que le cercle de Brodgar et Skara Brae. Elle était vraisemblablement entourée d’un fossé rempli d’eau pour symboliser la séparation entre le monde des vivants et celui des morts. Le site n’est accessible que par une visite guidée (visite très prisée, il faut réserver à l’avance). Par petit groupe on entre dans la tombe en passant par un étroit tunnel de neuf mètres de long dans lequel il faut avancer en se baissant puisqu’il ne fait qu’ 1,20 m de haut et 70 cm de large (claustrophobes, s’abstenir!). On accède ainsi à la salle principale dans laquelle on peut aisément se tenir debout. Dans les quatre murs se trouvent des cavités funéraires car Maeshowe était une tombe collective. Le plus surprenant, c’est qu’au moment du solstice d’hiver, les rayons du soleil couchant viennent s’engouffrer dans le tunnel et directement frapper la chambre funéraire du fond. Au XIIe siècle, un groupe de Vikings, probablement pris dans une tempête, se réfugièrent dans le tumulus pendant plusieurs jours. Ils y ont laissé beaucoup de graffitis gravés en runes ainsi que le dessin d’un dragon, devenu le symbole de Maeshowe.

CARNET PRATIQUE

  • tous les sites cités sont accessibles en voiture ou en bus avec la ligne X1 et 8S (pour Skara Brae)
  • Skara Brae: ouvert toute l’année, ticket d’entrée £9 en été (£7 du 1er octobre au 31 mars). Le ticket inclut la visite de Skaill House
  • Maeshowe: ouvert toute l’année mais seulement visite guidée sur réservation à l’avance, ticket d’entrée £9

Pour en savoir plus sur l’archipel des Orcades, vous pouvez consulter mes autres articles:

11 réflexions sur “Les trésors archéologiques des Orcades

  1. J’avais tellement aimé mes vacances aux Orcades. J’aurais voulu y rester plus longtemps, c’est sûr. Il y a tant à découvrir ! ♥ Merci de me refaire voyager.

    Par contre, oui… Les énormes bateaux de croisière faisaient tâche dans ce magnifique paysage. Et il fallait savoir prendre de l’avance sur les touristes qui débarquaient… avec leurs DIX bus. Hahahaha !

    • Oh je suis vraiment contente si je t’ai remémoré de bons souvenirs!! On a eu qu’une seule journée avec des touristes, deux paquebots débarqués en même temps, on était horrifiées. Mais y’a que à Skara Brae qu’on les a vraiment croisés.

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